Page 5 - Extrait - Le journal d'une folle
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de tissus (au moins neuf pieds) portée gracieusement par de mignons petits pages; les
petits garçons d’un côté, les petites filles de l’autre, puis les dames d’honneur et tout ce
beau monde habillé dans des vêtements choisis et commandés par elle – la facture
allant à la compagnie, de toute façon... La marche nuptiale joue et l’église, pleine à
craquer d’une foule euphorique qui l’applaudirait, elle, Heidy Montgomery qui marche
triomphante à travers la splendeur du plus grand mariage jamais vu dans cette petite
ville.
Lorsqu’elle se présenta à l’église pour la cérémonie, elle fit semblant d’ignorer le regard
chargé de reproches du pasteur qui la reçut très froidement. L’homme n’insista pas, car
il ressentit un vif malaise face à cette femme.
Il ne fallait pas oublier les invités. Elle demanda à Robert de l’aider. Et une liste de deux
cent cinquante personnes fut dressée. À la demande de Heidy, les faire-part furent
adressés et mis à la poste par Marty, la secrétaire de Robert, au grand dam de celle-ci
qui dut outrepasser ses heures normales de travail pour finir à temps. Pour la réception,
elle choisit naturellement un hôtel renommé pour sa nourriture exquise, offrant une
grande terrasse qui donnait sur une jolie rivière : là, on boirait du champagne à
volonté... La question du voyage de noces fut vite réglée. Heidy ne désirait rien de
moins que se payer les plus grandes merveilles d’Europe, durant tout un mois.
Dans l’entourage de Robert, on chuchotait que cette noce pourrait avoir une note dans
les six chiffres. Rien ne semblait assez beau pour Heidy. Elle en rajoutait sans cesse...
En réalité, elle s’étourdissait car un grave problème personnel n’était toujours pas réglé.
Quel accueil recevrait-elle de ses parents, qu’elle n’avait pas vus depuis des années,
lorsqu’elle se présenterait pour les inviter à son mariage? Elle était tourmentée par
cette question. L’admiration des étrangers, c’était bien. Mais à ses yeux, rien