Page 8 - Extrait - Le journal d'une folle
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Mais Laura, quant à elle, était dans une rage terrible. Partout où elle allait dans la ville,

              elle  sentait  des  regards  qui  s’attardaient  sur  la  femme  rejetée  qu’elle  était  devenue;

              certains pour s’en moquer, d’autres pour s’apitoyer sur son sort. Dans un cas comme

              dans l’autre, elle supportait très mal ce vedettariat à rebours. Elle avait même cessé de

              fréquenter ses amies du club de bridge. Elle s’enfermait maintenant chez elle et tentait

              de  noyer  sa  peine  dans  l’alcool.  Petit  à  petit,  elle  avait  pris  goût  à  ce  calmant  qui

              semblait  momentanément  effacer  toute  trace  de  souffrance  dans  son  âme.  Mais  ce

              qu’elle ignorait encore, c’était que cette thérapie traîtresse était en train de devenir un

              couteau à deux tranchants. Parfois, en fin de journée, ses enfants la trouvaient en tenue

              débraillée,  décoiffée, les yeux hagards.  Elle fredonnait en se  berçant dans sa grande

              cuisine  vide.  Elle  paraissait  avoir  complètement  perdu  le  sens  des  réalités.  Elle  se

              mettait alors à dire : « Il va falloir préparer le souper, votre père doit être à la veille de

              rentrer... » Mais elle ne bougeait pas, continuant à chantonner. Très inquiets, les jeunes

              en  avaient  parlé  à  leur  père.  Robert  pensa  qu’aller  la  voir  pourrait  avoir  des  effets

              négatifs en lui créant de faux espoirs. Il appela leur médecin de famille, qui connaissait

              Laura depuis des années. Et celui-ci promit de lui faire une petite visite à l’improviste

              pour juger par lui-même de la gravité de la situation.



              Le grand jour arriva enfin... Heidy avait demandé à Arline de l’aider dans ses derniers

              préparatifs. En réalité, c’était une façon d’avoir une amie à ses côtés en un moment si

              crucial. L’émotion étreignait les deux jeunes femmes qui passaient les dernières heures

              de leur vie commune ensemble. Heidy tenait à assurer son amie de son affection et de

              sa reconnaissance :



              –  Je  sais  que  je  n’ai  pas  toujours  été  facile  à  vivre,  mais  tu  as  été  merveilleuse  de

              patience et de compréhension.
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