Page 3 - Extrait - Le Meurtrier du Couvent
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Il réussissait toujours à préserver la réputation de l’Église en cas de péril.
Cependant, le prêtre avait cette fois-ci une très lourde mission à accomplir.
Il savait qu’il aurait à se surpasser. Cette affaire de meurtre était empoisonnée. La
présence des policiers avertis avant l’évêché et qui avaient pris l’affaire en main
compliquait encore sensiblement sa tâche. Dans ce genre de situation son rôle était
de bâillonner les rumeurs, d’étouffer le scandale dans l’œuf. Ici, on lui avait damé le
pion. Les dés étaient pipés. Il arrivait alors que la partie civile avait déjà pris toute la
place, ne lui accordant qu’une très mince marge de manœuvre.
Le fin renard sut encore toutefois très bien tirer son épingle du jeu. Le policier
pouvait rencontrer tous les témoins qu’il voulait? Qu’à cela ne tienne! Il aurait lui aussi
son bureau d’inquisition; c’était le cas de le dire. Le chanoine R. décida d’exiger une
confession obligatoire pour tout le personnel du couvent. Il demanda à la Sœur
portière d’aller quérir la Mère Supérieure, en lui précisant que l’envoyé de
Monseigneur désirait lui parler. Il imaginait en riant la tête de la Mère Provinciale,
dévorée de curiosité et furieuse de n’avoir pas été, elle, convoquée en premier lieu.
L’envoyé épiscopal était un pince-sans-rire. Mère Marie Des-Saints-Anges arriva un
peu surprise, mais elle lui dit avec une amabilité non feinte :
– Bonjour Monsieur le Chanoine, je ne crois pas que nous ayons eu le plaisir de nous
rencontrer. Je suis la Supérieure de ce couvent.
– Bonjour ma Sœur, je suis très heureux de faire votre connaissance quoique j’eusse
préféré que cela fût dans d’autres circonstances...