Page 7 - Extrait - Le Meurtrier du Couvent
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séparait le prêtre du pénitent. Le confesseur prêtait son oreille au pécheur qui, lui, à
genoux, disait ses fautes.
– Pardonnez-moi, mon père, parce que j’ai péché. J’ai...
Et commençait l’énumération des fautes. Souvent, on débutait par des peccadilles.
Les plus malins tentaient d’insérer un gros péché mortel à travers une avalanche de
fautes vénielles. Mais le prêtre, un peu somnolent et plus ou moins asphyxié par les
haleines fétides, avait un sixième sens qui le réveillait à la moindre évocation de faute
grave. Il se redressait alors, retrouvant soudain tous ses esprits, et commençait un
interrogatoire serré… Comment? Combien de fois? Avec qui?... Et patati et patata,
puis suivait une formule de pardon, un acte de contrition, une absolution et une
pénitence. C’était le scénario pouvant durer plusieurs heures, surtout s’il n’était
question que de fautes légères ne réussissant pas à tirer le prêtre de son
engourdissement. Le Chanoine eut tôt fait d’expédier toutes les juvénistes en deux
heures. Il prit un petit répit et avala un café pour combattre le sommeil, puis s’attaqua
aux religieuses.
L’homme n’avait strictement rien appris avec les enfants. Même la petite Marie-Céline
avait jugé bon de tenir la religion en dehors de sa grande passion amoureuse,
convaincue que le prêtre n’y comprendrait rien de toute façon. Elle avait raison de
penser qu’il ne partagerait certainement pas le même point de vue qu’elle sur la
question. Les religieuses n’avaient rien de bien intéressant à raconter non plus, et
monsieur l’abbé R. commençait à se demander s’il ne perdait pas carrément son
temps, poursuivant une idée qui, somme toute, n’était peut-être pas si brillante qu’il
avait été enclin à le penser.